Nomination:
2006 Pushcart Prize
The English tranlations of the French are below the poems in French.
L’enfant merveilleuse
Au seuil de la maturité, j’ai commencé à rêver les yeux ouverts, d’une petite fille qui m’accompagnait partout et qui était moi et mon enfant à la fois. Elle était légère et vivace, sage et cependant sensible, proche et cependant lointaine. Dès le moment où elle eut apparu dans ma vie, je chassai de mon âme tout désir de jamais aimer un homme, tout désir d’aimer, tout désir (“Tout” est une façon de parler, bien sûr.). Je lui offris tout mon sang et la moelle de mes os, et me mirai dans ses yeux comme dans un puits sans fond, et l’enfant merveilleuse grandissait, et plus elle était réelle, plus je devenais irréelle.
The Marvelous Child
On the threshold of adulthood I began to dream of a little girl who followed me everywhere and who was myself and my child at the same time. She was light and joyful, wise, yet sensitive, close, yet far away. As soon as she came into my life, I banned from my soul all desire to ever love a man again, all desire to love, all desire (“All” is a way of speaking, of course). I gave her all my blood and the marrow of my bones, and I saw my reflection in her eyes as if into a bottomless well, and the marvelous child grew, and the more real she was, the more unreal I became.
Copyright © 2006 by Alta Ifland.
Ma langue
Ma langue gît ensevelie au centre de la terre. Quand la nuit vient, les rêves ouvrent les portes du temps et les noirs corbeaux aux ailes bruissantes s’envolent faisant place à un long sommeil de plomb. Les gardiennes de la langue, des momies muettes drapées de linceuls, voguent dans les quatre points cardinaux, les visages raides, les lèvres couleur de pourpre, les yeux peints en bleu. À l’aube, elles se retirent dans les recoins de la mémoire.
Ma langue ne m’appartient pas. Tout ce qui m’appartient est une longue absence fleurie aux bords de laquelle poussent des rosiers qui descendent le long de mes jambes, s’entrelacent et couvrent mon corps comme un tombeau. Ma langue puise dans l’absence ses mots de brume, morts comme moi, pour les tenir un instant au-dessus du tombeau, ensuite les laisse tomber comme des pétales de rose.
My Language
My language lies buried in the center of the earth. When night comes, dreams open time’s gates and the black ravens with rustling wings take off, leaving behind a long, leaden sleep. Language’s guardians, mute mummies draped in shrouds, float at the four cardinal points, their faces frozen, lips crimson, eyes painted blue. At dawn, they sink back into memory’s cracks.
My language doesn’t belong to me. All that belongs to me is a long, flowery absence at whose edges roses are growing alongside my legs, encircling them, climbing and covering my body like a tomb. Deep in the absence, my language unearths its words of fog, dead like me, and holds them for an instant above the tomb, then lets them fall like petals.
Copyright © 2006 by Alta Ifland.
Noces (après la fête)
Les apothicaires des voluptés versent des potions enchantées dans les verres circoncis, laissés dehors, sur la table. Les invités sont partis. À un coin de la table, l’épouse gît endormie, la bouche entrouverte, un fil de salive s’apprêtant à tomber dans le décolleté ravagé, portant encore l’empreinte des mains de l’époux qui, quelques heures auparavant avait essayé de trouver ce que Balzac a une fois appelé “les deux colombes blanches.”
Quelqu’un cherche l’époux, mais il est introuvable. Seuls les mégots jetés par terre et les restes de vomissure savent qu’il est lové sous la table, braguette ouverte, nez saignant, oeil oublieux. Il rêve d’une grande étendue d’eau, et, inspiré, décharge sa vessie, pataugeant bientôt en une flaque d’urine puante. De son côté, l’épouse gémit en rêve et ouvre ses jambes, mais non pour l’époux. Pour le vent.
Wedding (after the feast)
The apothecaries of voluptuousness pour enchanted potions in the circumcised glasses left outside, on the table. The guests are gone. At a corner of the table, the bride lies asleep with her mouth open, a string of saliva dribbling into her ravaged cleavage, still feeling the touch of the groom’s hands, who several hours before had tried to find what Balzac once called “the two white doves.”
Someone is looking for the groom, but he is nowhere to be found. Only the cigarette butts thrown on the ground and the vomit know that he is coiled under the table, with his fly unzipped, his nose bleeding, his eyes full of forgetfulness. He dreams of a big flood, and, inspired, unloads his bladder, floundering soon in a puddle of stinking urine. For her part, the bride moans in her dreams and opens her legs, but not for the groom. For the wind.
Copyright © 2006 by Alta Ifland.
Mort
Un ami arabe m’a dit un jour : “Je trouve si rassurante la pensée qu’un jour je ne serai plus.”
C’est là une manière de voir les choses qui est très naturelle ; mais qui parmi nous, les Occidentaux, pourrait dire cela? Nous luttons contre la mort et nous luttons contre la vie.
Il y a quelque part une compagnie qui transforme le corps de votre cher défunt en un diamant. Vous pouvez l’emporter partout, même quand il n’est plus là. “Rien ne se perd dans la nature, tout se transforme,” nous a-t-on appris il y a longtemps à l’école.
Même la mort n’est plus sans reste.
Death
An Arab friend once told me: “I find so reassuring the thought that one day I will be no longer.”
This is a very natural way of seeing things; but who among us Westerners could say this? We fight against death and we fight against life.
There is somewhere a company that transforms the body of your dearly departed into a diamond. You can take it everywhere with you, even when he is gone. “Nothing is lost in nature, everything is transformed,” we have been taught in school.
Even death is no longer final.
Copyright © 2006 by Alta Ifland.
Biography:
Alta Ifland lives in California and writes in English and French. Her prose poems have appeared in Prairie Schooner, Parthenon West Review, The Bathyspheric Review, Santa Clara Review, Pacific Review and Cafe Irreal. Her fiction has appeared or is forthcoming in The Cream City Review, The Redwood Coast Review and other magazines.